Actualités - Colloque "Partager notre mémoire industrielle" - Considérations finales

Publié le 5 janvier 2023

par Massimo Preite, Membre du Comité de Direction de The International Committee for the Conservation of the Industrial Heritage (TICCIH) et membre du comité de direction de European Route of Industrial Heritage (ERIH)

Bonjour à tous. Nous sommes arrivés au terme de ce colloque, et je tiens à remercier tous les organisateurs de cette manifestation de m’avoir aimablement invité à tirer les conclusions de ces deux jours intenses de débat qui ont célébré le dixième anniversaire de l'inscription des Sites miniers majeurs de Wallonie à l'Unesco. 2022 est également une date importante pour une autre raison, puisque cette année marque aussi le 50e anniversaire de la Convention du patrimoine mondial de l'Unesco.

Je voudrais donc commencer par quelques remarques sur le rôle que les sites industriels ont joué dans ces 50 années de construction du patrimoine mondial. La dernière évaluation quantitative de la présence du patrimoine industriel sur la liste de l'Unesco remonte à 2015 : dans le Journal du "Comité national d'ICOMOS Allemagne", n° 62, expressément consacré à ce sujet, figurait une liste composée par 46 sites industriels déclarés sites de l’UNESCO, soit 5,6 % (sur un total, cette année-là, de 814 entrées) ; depuis, d'autres ont été ajoutés, mais le nombre global de World Heritage Sites a également augmenté, et je pense donc que le poids en pourcentage n'a pas substantiellement changé.

En dépit de cette présence limitée, il est néanmoins indéniable que les sites industriels inscrits ont eu un grand mérite, celui d'avoir accompagné, et parfois anticipé, l'évolution de notre manière de concevoir le patrimoine culturel au cours de ces derniers cinquante années. Le patrimoine industriel, progressivement inscrit, a été un miroir fidèle des principales innovations doctrinales apportés aux critères originaux de la Convention pendant le demi-siècle passé.

Je me contenterai de rappeler trois moments importants de cette évolution. Le premier concerne l'approbation, en 1994, de la "Stratégie globale pour une Liste du patrimoine mondial équilibrée, représentative et crédible". Cette réorientation stratégique est devenue nécessaire lorsqu'on s'est rendu compte qu'après les 20 premières années d'application de la Convention, le patrimoine inscrit sur la liste de l'Unesco était principalement constitué de monuments traditionnels (tels que les cathédrales, les châteaux, et les autres chefs-d’œuvre de l’architecture en général), situés pour la plupart en Europe. D'où la décision d'un rééquilibrage géographique et sectoriel du patrimoine à inscrire. Grâce aux efforts de TICCIH, le patrimoine industriel a été reconnu comme un patrimoine sous-représenté, et une liste de 33 sites d'intérêt potentiel a été rédigée, dont beaucoup ont été inscrits au cours des années suivantes.

Le deuxième moment à retenir concerne la création en 1992 de la nouvelle catégorie de Paysages Culturels, brièvement définis comme des « Œuvres conjuguées de l'être humain et de la nature » qui expriment une longue et intime relation des peuples avec leur environnement. Or, c'est au crédit des paysages industriels que le périmètre conceptuel de cette catégorie a été élargi. Au début, en fait, son application ne concernait que les paysages agraires, expression de la continuité et de la durabilité de la civilisation paysanne et de ses modes d'organisation du travail. En l'an 2000, l'inscription du « Paysage industriel de Blaenavon » (au Pays de Galles) a marqué un profond changement de paradigme, dans la mesure où, depuis lors, dans la catégorie des paysages culturels ont également commencé à être admis les paysages miniers, à savoir  des paysages « inhabituels » qui, contrairement aux paysages ruraux, n’étaient pas le produit de la longue durée, mais plutôt le résultat d'une rupture soudaine, déterminée par le démarrage souvent brutal, pour l'environnement et la société traditionnelle, d'un processus de modernisation industrielle sans retour. Celle de Blaenavon a été suivie dans les années suivantes par les inscriptions de la Grande Fosse minière de Falun en Suède (en 2001), du Paysage minier des Cornouailles et du Devon (en 2006), du Bassin minier Nord Pas de Calais en 2012 et des Sites miniers majeurs de Wallonie dans la même année.

Avec ces deux dernières inscriptions, nous arrivons au troisième moment que je souhaitais évoquer, car elles ont ouvert de nouvelles voies aux pratiques patrimoniales : jamais auparavant des territoires aussi vastes n'avaient été considérés comme un patrimoine culturel unitaire, digne de protection malgré l'extrême variété de ses attributs : le paysage minier à grande échelle est en effet un paysage hybride, dans lequel s'entremêlent le paysage industriel au sens strict (puits d'extraction, équipement pour le traitement du minerai, dépôts), le paysage des déchets (terrils, bassins de résidus, etc.), le paysage d'infrastructures, et le paysage urbain dans sa riche variété de cités minières (ici en Wallonie sont présents quelques exemples majeurs comme le Bois du Luc, le Grand Hornu, et d’autres).

En fait, les deux inscriptions de 2012 ont ouvert la voie à l'utilisation de la méthode des inscriptions en série, qui a fait l’objet de la déclaration finale d’une "Réunion internationale d'experts", réunion qui s'est tenue en Suisse en 2010 à l'initiative du Comité du patrimoine mondial.

Depuis lors, l'utilisation de nominations en série est devenue une pratique fréquemment adoptée, si l’on pense aux inscriptions des « 23 Sites de la révolution industrielle Meiji » au Japon en 2015, de la Région minière de Erzgebirge/Krušnohoří en 2019 (composée de 22 éléments constitutifs) et, dans la même année, du Patrimoine de la mine de charbon d'Ombilin à Sawahlunto en Indonésie, composé de trois zones fonctionnellement liées: le site de la mine et la cité minière, les installations de stockage du charbon au port d'Emmahaven et le réseau ferroviaire reliant les mines aux installations côtières.

On peut se demander s'il n'est pas excessif d'accorder autant d'attention à un aspect apparemment technique comme la sérialité de ces inscriptions.  Mais la sérialité n'est en aucun cas une question secondaire, surtout en tenant compte de deux principes fondamentaux, clairement énoncés dans la déclaration susmentionnée :

  • - Tout d'abord, la mise en garde que la série ne doit être assimilée à « un simple catalogue de sites » ; au contraire la série se justifie par une définition adéquate des liens fonctionnels entre les éléments constitutifs, et par une explication de la manière dont ils contribuent à la valeur universelle exceptionnelle (VUE) du bien dans son ensemble (2.1.i).

  • - En conséquence "la compréhension du concept et du cadre scientifique des inscriptions sérielles ne peut se passer de l'utilisation de nouvelles technologies (1.6)" qui permettent au visiteur de saisir non seulement l'importance individuelle d'un site, mais le système de valeurs qui ne peut être appréhendé que par une vision capable d’embrasser la nature synergique de la série.

Or, si tels sont les objectifs - ne jamais perdre de vue l'ensemble de la série et, dans ce but, l'emploi des nouvelles technologies - je crois que ces deux journées de conférences nous ont montré un large arsenal des nouveaux outils qui sont à notre disposition : des " salles immersives » du Musée d’Art et d’Industrie de Saint-Etienne " aux " visites virtuelles " pour accéder aux espaces méconnus, en danger ou non visitable du patrimoine industriel en Wallonie,  de la reconstitution virtuelle en 3D de la grotte de Lascaux aux jeux numériques sur la migrations  des Luxembourgeois vers les États-Unis au XIXe siècle, etc.

Chacun d'eux offre aux visiteurs des modes de perception qui peuvent élargir leur compréhension de l’individualité d’un site observés au système sériel auquel il appartient.

Je crois donc que chaque musée, chaque lieu de mémoire, chaque centre d'intérêt doit aménager son exposition et ses outils d'interprétation en gardant à l'esprit l'objectif principal : ne jamais renoncer à encadrer un site particulier dans la série dont il participe, et à expliquer sa valeur en tant qu'élément constitutif d'un tout en dehors duquel sa signification reste incomplète.

D'autre part, c'est la véritable mission des musées : lorsque vous ouvrez la page Internet de l'ICOM, le premier message qui ressort est le suivant : « les musées n'ont pas de frontières, ils ont un réseau ». Voilà, je pense qu'il n'y a pas de meilleure expression pour condenser en quelques mots la mission réelle des musées, et qui est celle de produire network, d’établir de liaisons, de développer des connexions. De cette mission les intervenants ont montré d’avoir pleine conscience : qu’on se souvient, parmi les activités extra-muros organisées par l’Industriemuseum de Gand, des divers itinéraires (walking tours) qui permettent l’exploration du patrimoine industriel de la ville, ou des Regional Routes de ERIH pour la valorisation des productions typiques des territoires. Dans tous ces cas c’est la mise en réseau qui compte.

Cependant, il serait trop simpliste de réduire la valorisation d'un patrimoine aussi complexe que celui des mines wallonnes à une question d’innovation de leur appareil de médiation et d’interprétation. Dans le « document de base » que nous avons tous reçu on trouve mentionnés quels sont les principaux enjeux auxquels les quatre sites devront faire face dans les années à venir :

  • - en premier, la transmission de la mémoire industrielle à une époque où les témoins directs tendent à disparaître progressivement.

  • - ensuite, la compétitivité du tourisme industriel face à une offre touristique culturelle qui s'étend et se diversifie impétueusement.

  • - et, au final, l'adaptation insuffisante des sites historiques au langage et aux modes de communication et de médiation actuels.

Grand nombre des expériences illustrées dans les présentations de ces deux journées ont tenté d’apporter des réponses à ces enjeux. Je vais essayer de revenir en détail sur chacun de ces enjeux. Mais je crois qu’au lieu d’évaluer les solutions spécifiques, il vaut mieux partir de celui qui constitue le plus grand défi à relever dans le prochain avenir, à savoir la redéfinition en cours de la mission des musées et des sites culturels en général. On est tous au courant que le 24 août dernier, à Prague, l'ICOM a approuvé une nouvelle définition du musée, qui l’engage à exercer, en plus des compétences canoniques de conservation et d'exposition du patrimoine, toute une nouvelle série d’activités visant à encourager l'inclusion, à valoriser la diversité et à promouvoir la participation de la communauté. Par ailleurs, je tiens à signaler que des exhortations à un engagement social plus fort avaient déjà été formulées, sous une forme beaucoup plus radicale, dans une proposition de l’ICOM à Kyoto en 2019, proposition qui n'a jamais été approuvée.

Si l'on regarde les expériences en cours, on ne peut que constater que la Déclaration de Prague, plutôt qu'un programme pour l'avenir, est plutôt la reconnaissance d'une évolution déjà en cours : toujours plus nombreux sont les musées qui cherchent à s'ouvrir à de nouveaux publics, en développant des approches de moins en moins élitistes, et plus dialogiques. De la diversité des expériences en cours, se dégage un remarquable effort commun pour se conformer à l'exhortation du document de Kyoto, celle à "travailler en partenariat actif avec et pour diverses communautés... dans le but de contribuer à la dignité humaine et à la justice sociale, à l'égalité mondiale et au bien-être de la planète".

Un vaste programme, certes teinté d'idéologie, face auquel, cependant, toutes les institutions muséales visant à innover devront se rapporter, en établissant une relation plus directe avec la communauté, ou plutôt avec les communautés, car la communauté au singulier est une abstraction.  En fait la diversité sociale et culturelle de la société contemporaine est la conséquence de la coexistence de plusieurs communautés, avec des valeurs et des traditions distinctes, qui interagissent et négocient dans un travail collectif de construction d'un patrimoine culturel idéalement partagé, mais nécessairement sillonné par les lignes de fracture entre des identités multiples qui ont parfois du mal à cohabiter dans un espace identitaire commun.

À cet égard, je crois pouvoir dire que dans les présentations qui nous ont été faites, une pleine conscience de la nécessité d’entreprendre une nouvelle démarche apparait :

  • - Bertrand Gène, responsable du Discovery Museum à Kerkrade (NL), a déclaré que nous devons passer d’un musée orienté vers les collections à des institutions orienté au public, en s’adressant plus directement aux questions et aux attentes des visiteurs et de la société ;

  • - Marie-Caroline Janand, directrice de la Mine Couriot de Saint-Etienne, a bien souligné le changement intervenu dans le rapport entre le public et le bien patrimonial : le public accepte de moins en moins un rapport passif et réclame un rôle d’acteur ;

  • Les conclusions du workshop organisé par le Bois du Luc, sont allées, me semble-t-il, dans la même direction, en souhaitant « le passage d’une médiation top down à une médiation en accord avec les enjeux de notre société ».

Pour s’adresser aux nouveaux publics et en promouvoir l'inclusion et la participation, les musées devront entreprendre une révision profonde des systèmes narratifs utilisés. Dans beaucoup d'entre eux persistent des récits autoréférentiels, dont les messages ont été élaborés par des spécialistes et des experts pas toujours suffisamment sensibles aux attentes et aux motivations des visiteurs.

Aujourd'hui, la mission du musée est remplie selon une procédure inversée : partir des intérêts et de l’histoire vécue des différentes communautés « patrimoniales » (comme elles ont été définies par Fernand Collin, directeur du Préhistomuseum, Flémalle, Belgique), afin d'évaluer les médiations nécessaires pour donner réponse aux demandes dont elles sont porteuses. Si l'activité muséale est réorientée dans cette direction, si la conception muséographique doit naître du public et de ses formes de participation, il est probable que nombre des récits traditionnels devront être révisés. Une tache immense qui exige un effort considérable pour garantir la transmission de la mémoire industrielle.

A mon avis, la première démarche à faire est celle de repenser les thèmes forts de l’inscription des quatre mines de charbon de Wallonie. Le dossier soutenait que la candidature sérielle était justifiée car elle témoignait d'un lieu précoce de diffusion :

  • - des innovations techniques et urbaines de la révolution industrielle ;

  • - de valeurs sociales, notamment suite à l'accident de Bois-du-Cazier (1956) ;

  • - de l'interculturalité née de l'industrie de masse, par la participation d'ouvriers venant d'autres régions de Belgique, d'Europe puis d'Afrique.

Concernant le premier thème, les 4 sites et leur cités minières offrent des témoignages sans équivalent d'innovation technique et urbanistique dont la matérialité ne peut être remplacée par aucun équivalent numérique. Les progrès de la réalité virtuelle et des dispositifs immersifs, du moins dans ce cas, ne constituent pas une menace de dématérialisation de l'espace muséal (comme le craignent souvent certains responsables de musées aux prises avec ces nouvelles technologies). Les sites miniers de Wallonie sont là pour rester. La matérialité de leur équipement est un élément incontournable qui domine aussi les représentations du monde minier dans les bandes dessinées (comme il a été bien montré par Nicolas Vershueren de l’Université libre de Bruxelles). Il est impensable, contrairement peut-être à d'autres types de patrimoine, qu'ils puissent s'évaporer en un musée "portable" (n'ayant plus de lieu physique propre) grâce aux techniques futuribles de la réalité augmentée. Mais comment ne pas penser que, tout en conservant la matérialité des sites en question, on peut profiter de leur "portabilité" virtuelle pour rapprocher le public que l'on souhaite solliciter à visiter ce patrimoine en présence ? Amener, alors, dans les écoles ou dans d'autres lieux de rassemblement social des équivalents numériques capables d'offrir des représentations immersives captivantes peut devenir un expédient efficace pour s'adresser à des publics que l'on souhaite attirer vers les sites à valoriser. En tout cas, une première conclusion de ce colloque devrait être celle de se débarrasser d’une fausse opposition : comme a été dit par Fernand Collin, « la virtualité doit se constituer en conjugaison avec le patrimoine authentique », d'autant plus que l’étude et la conservation du patrimoine physique peut tirer des bénéfices inestimables de la digitalisation (Romain Jacquet, Musées et Société en Wallonie).

Le second thème, celui des valeurs sociales constitue une occasion féconde d'intégration/diversification narrative. Si l'innovation technique et urbaine place au centre du récit le rôle des entrepreneurs dans un projet de modernisation qui vises à intégrer, dans sa quête de rationalité économique, les différents éléments qui composent le mosaïque de l’entreprise (des lieux de production, aux infrastructures, aux logements pour les travailleurs), les valeurs sociales exigent, au contraire, une narration qui repose sur un autre point de vue, celui des ouvriers, celui de leur expérience personnelle du travail dans les mines : la tragédie du Bois du Cazier ou la « maladie jaune » (dont Stéphane Laridan et Audrey Lampérière du Centre Historique Minier de Lewarde nous ont parlé) sont à plein titre des événements qui se prêtent bien à une récit dont la narration puisse se développer à partir du point de vue de l’ouvrier. L'adoption de ce regard suppose, comme le notent Marie-Paule Jungblut (Université du Luxembourg) et Kostas Apostolakis (Fondation pour la recherche et la Technologie, GR), un effort considérable d'« empathie » pour s'identifier, autant que possible, avec les histoires individuelles de travailleurs qui ont vécu l'expérience du travail dans la mine. Pour réussir à établir ce rapport d’empathie il devient nécessaire s’adresser à la sensibilité personnelle des visiteurs, plutôt que de compter sur leurs capacités de perception rationnelle.

A cet égard, j’ai trouvé bien pertinent les appels de Christiane Baum (ERIH) et de Marie-Caroline Janand à reconnaitre le rôle majeur de l’« émotion » dans l’expérience muséale, à travers un recours toujours moins marginal à l’attrait grandissant pour les perceptions sensorielles auprès des visiteurs (« leur vue, leur oui, leur sens »). En même temps, on ne peut ignorer qu'à la suite de ce glissement tendanciel, dans les expériences de visite du public, des formes de perception intellectualisées à des formes émotionnelles/sensorielles, il y a le risque qu’un changement profond puisse intervenir dans la nature même des musées tels que nous les connaissons, du moment qu’ils montrent une progressive inclinaison à évoluer de lieux d'exposition à lieux de spectacle. Aussi inévitable que soit cette évolution, elle ne doit pas nous dispenser de la recherche d'un juste équilibre entre ces deux manières dont les visiteurs peuvent se rapporter aux lieux et aux récits du patrimoine industriel.

Enfin, le thème de l'interculturalité, un thème d'une grande actualité, puisque les limites des récits du patrimoine industriel sur une base euro-centrique sont de plus en plus perceptibles.

Si l'industrialisation a eu son épicentre en Occident, la compréhension de ce phénomène devenue de dimension universelle reste incomplète si nous n'élargissons pas notre activité cognitive à ses effets de propagation dans d'autres contextes non européens et à ses effets centripètes en termes de main-d'œuvre attirée d'autres pays et continents. Là aussi on a pu constater, grâce à Marie-Paule Jungblut, combien de nouvelles formes de médiation telles que les "jeux numériques éducatifs" peuvent contribuer à diffuser les thématiques interculturelles chez les jeunes. En conclusion je crois que l'interculturalité qui sous-tend l'inscription des quatre « sites miniers majeurs » représente le cadre meilleur où, grâce à la participation de tant de travailleurs étrangers et à l'apport de leurs cultures d'origine, puisse se développer un puissant récit polyphonique de l'histoire minière en Wallonie. A ce propos un des thèmes soulevés dans le Workshop du Bois du Luc, celui des « femmes invisibles », les « oubliées de la mine », s’inscrit à plein titre dans cette vision plurielle des cultures.

Mais permettez-moi une dernière considération concernant la dimension européenne de ce patrimoine. Aujourd'hui, notre continent, peut-être plus que d'autres, est confronté à un défi existentiel, celui de l'approvisionnement énergétique. Je voudrais rappeler que les lieux dont nous célébrons aujourd'hui l'inscription sur la liste de l'Unesco ont déjà été le théâtre d'un défi similaire au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Même à cette époque, il y avait une grande soif d'énergie qui a été résolue par un audacieux acte de coopération entre d'anciens États belligérants, la construction de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (1952), dont le 70e anniversaire tombe cette année (un autre anniversaire à célébrer). Grâce à cette construction, la bataille a été gagnée. Espérons que, grâce à un autre projet de coopération tout aussi audacieux, la bataille de l'énergie puisse être gagnée encore une fois. Espérons que le témoignage qui émane encore de ces lieux puisse être un exemple pour l’avenir de notre continent. Merci de votre attention.